Monday, October 19, 2015

Google Earth

 A défaut du fichier .kmz que je n'ai pas réussi à télécharger, je poste une image .jpg de la carte réalisée. A noter que, sur Google Earth, le site de la centrale nucléaire apparaît brouillé par rapport à son environnement immédiat alors que ce n'est pas le cas sur Géoportail. Les Américains sont apparemment plus soucieux de notre sécurité que nous-mêmes à moins que cette précaution soit inutile...


Les commentaires associés aux pointeurs étaient les suivants :

- centrale nucléaire de Chinon/Avoine : aujourd'hui, la centrale comprend quatre réacteurs en fonctionnement, chacun ayant une puissance de 900 mégawatts électriques.
Trois réacteurs plus anciens sont arrêtés définitivement, dont le premier réacteur français ayant produit de l'électricité sur une échelle industrielle (démarrage en 1963, 70 mégawatts);

- limite du site nucléaire : le site occupe grossièrement un triangle rectangle de 1,3 km de côté, soit une surface d'environ 85 hectares;

- la Loire : l'eau prélevée dans le fleuve est envoyée vers les réfrigérants atmosphériques;

- bâtiment réacteur : le bâtiment réacteur, en béton armé, et d'une cinquantaine de mètres de hauteur, abrite la cuve qui contient l'uranium;

- réfrigérant atmosphérique : dans ces tours, l'évaporation d'une partie de l'eau prélevée dans la Loire permet de refroidir les réacteurs.





Google Earth

Google earth est une application développée par l’entreprise Google. Elle a pour but de cartographier l'ensemble du globe terrestre par image satellite. Les clichés sont renouvelés au bout de quelles années.

L'application est dotée d'outils très intéressants pour l'historien, comme la possibilité de sélectionner les images satellites en fonction des années de prise. La
possibilité d'afficher de nombreuses informations importantes (position GPS, affichage des parallèles et cercles, etc.). Il est possible d'utiliser une règle ainsi qu'un calculateur d'itinéraire. L'application dispose d'une légende très poussée et totalement désactivable de façon a ce qu'on puisse affiché ce que l'on désire même des photos de vacances d'utilisateur ce qui peut donner des images supplémentaires de bâtiments qui serai aujourd'hui détruit comme des sites de Palmyre par exemple.
Enfin la fonction street view elle permet de voyager dans presque toutes les villes occidentales et de nombreuses villes.
L’image est assez nette, très précise bien que l'application nécessite une connexion internet avec un débit correct pour la faire marcher sans trop attendre. Le système de zoom est pratique il permet de profiter de détails pointus. L'orientation de la caméra peut se remettre en place rapidement grâce à la boussole.
À la différence de Google Maps qui donne une carte en fonction du lieu de IP Google earth est un peu plus honnête. Par exemple si vous vous connectez en Russie la Crimée sera Russe. En France elle est Ukrainienne. Google Earth a pris soin de délimité les zones disputées en rouge ou orange ce qui est sommes toute plus le reflet et la situation réels. Google Earth par l'image satellite donne accès à des endroits très difficilement accessibles comme la vue de ville, bâtiments ou complexe d'une dictature. C'est un outil précieux, gratuit qui permet de rechercher presque n'importe quels lieux sur terre.


Mon travail cartographique est le parcours des armes de Saint-Étienne à la Bastille en passant par la Loire et la Seine, cette réalisation à été faite sur le site Géoportail sur la carte de Cassini et importé sur Google Earth, on peut noter l’extrême précision d'une carte pour le 18e siècle !

Analyse des textes de Monmonier et Wood



Mark S. Monmonier, Comment faire mentir les cartes ou Du mauvais usage de la géographie, Paris : Flammarion, 1993, pp. 11-95 et pp. 133-176
Denis Wood, Rethinking the Power of Maps, New York / London, The Guilford Press, 2010, chapitres 2 à 4.



Dans l'analyse d'une carte, il faut tous d'abord se pencher sur le choix des projections utilisées et de l'échelle.
Le type de projection est une question aussi épineuse que délicate. Les déformations sont induites au passage sur planisphère, mais quelles déformations choisir ? Celle de l’accentuation des océans, celle de l’hémisphère nord ? Une projection polaire par exemple empêche de voir une grande partie de l’hémisphère opposé. La projection Mercator elle déforme la taille des États-Unis d'Amérique et surtout du Groenland qui devient aussi gros que l'Afrique ! Une projection a l'équateur déforme la taille au plus on se rapproche des pôles. Une projection aux tropiques elle déforme la vraie distance entre les l'équateur et les tropiques. Une fois la projection choisie il faut se demander où centré la carte, car cela répond a des problématiques et des sensibilités diverses.
Le choix des échelles peut impacter beaucoup de choses. Une carte à petite échelle ne permet pas d'apprécier certains détails. Une carte au 1:25000 est idéale pour les routes alors qu'une 1:100000 est idéale pour les randonneurs.
Les formes sur la carte peuvent être réduites ou agrandies comme une route sur les cartes routières (il est aisé de comprendre qu'une route n'a pas la taille à l'échelle de la carte pour mieux la voir). On peut aussi simplifié les formes, en lissant les courbes, mais cela nuit a la bonne représentation du monde.
Le choix des couleurs, mais aussi pourcentage permet aux cartographes peu scrupuleux d'orienté le sens de lecture. Les surfaces plus ou moins grandes faussent également une bonne représentation de la situation. Ce genre d'utilisation est fréquente dans des domaines, politiques, économiques, climatiques, etc.
Il est possible de jouer sur les figurés, leurs tailles, leurs formes, leurs couleurs pour instrumentalisé la lecture via les préconçus psychologique et l'inconscient. La figuration et le choix des symboles est le domaine d'analyse de Denis Wood.
Monmonnier nous rappelle que même l'histoire militaire nous a appris la nécessité d'une bonne carte. Les campagnes américaines furent endeuillées ou plus difficiles par l'absence de ces bons outils comme pendant la guerre de Sécession ou l'invasion de l'ile de Grenade. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands utilisèrent les très bonnes cartes Michelin pour planifier leurs opérations. Cet exemple nous induit aussi sur la non-représentation de certains éléments à but stratégique pour un pays.
Aux États-Unis d'Amérique une grande diffusion des cartes se fait dans les années 70 avec le cas des établissements pétroliers offrant dans les stations essence leurs cartes routières. Mais pas qui veut ne s’improvise cartographe et ces cartes furent de piètre qualité. Elles étaient pourvues d'erreurs cartographiques par les éditeurs qui travaillaient sur des données anciennes (parfois d'anciens noms de rues), faisant un travail rapide et de piètres qualités. Il est important de critiquer le travail d'un cartographe surtout que nous sommes à une époque où le monde change extrêmement vite du a une urbanisation très importante.
Les cartes aux services de la propagande politique sont travaillées par les deux auteurs. L'ouvrage de Denis Wood dans l'extrait analysé s'ouvre sur l'utilisation des cartes dans le cadre politique pour créer une illusion dans la représentation des votes entre Républicains et Démocrates. Comme l'ouvrage précédent c'est sur la densité qu'est joué l'illusion et c'est avec une carte anamorphose qu'on constat la supercherie.
Les cartes permettent de cacher les conflits internes d'un pays en « lissant » son image. La carte met en valeur les éléments que le politique souhaite montrer en avant. Elle donne plutôt l'ambition ou l'image souhaitée du politique.
La cartographie est un élément de politique étrangère comme pour les revendications territoriales comme le cas du cachemire. Ou les Falkland et l'utilisation des timbres argentins revendiquant les Malouines pendant la guerre du même nom. Souvent un gros pays d'une couleur bien défini devient tout de suite plus menaçant même si ce dernier est composé de vaste étendue de terres infertiles ou non mises en valeur. Le choix des figurés et aplats est primordial pour bien truquer une carte, jouant sur des statistiques grossières souvent sans comparaison valables. Ces exercices sont bien réussis dans les années avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. L'orientation d'un simple figuré peut donner un aspect plus ou moins menaçant comme l'exemple de l'orientation de missiles nucléaires lors de la guerre froide notamment. Les cartes ne sont pas un objet de représentation, mais un outil de pouvoirs.
Les relations entre l'histoire et la géographie nous ont été dépeintes de façon très noire et pessimiste. Bien que la lecture est intéressante pour comprendre les « trucs et astuces » nécessaires à avoir l’œil critique sur une carte. Les relations entre histoire et géographies sont interdépendantes bien qu'elles nous sont dépeintes par des aspects peu reluisantes de la cartographie au service des puissants. Une partie importante de sa production est tournée autour de cette problématique. Malgré tous les exemples sont encore très parlante surtout sur les conflits dans l'exemple de la colonisation israélienne ou de l'annexion de la Crimée, les divers protagonistes ne brandissent pas les mêmes cartes.


Sunday, October 18, 2015

Rapport méthodologique : Google Earth

Le logiciel Google Earth a été développé par la société Google, dès 2004, pour permettre une visualisation de la Terre, de ses paysages autant urbains que ruraux, mais aussi des plus beaux lieux touristiques. Aujourd'hui, les données sont disponibles en trois dimensions depuis l'application ou le site internet - gratuits tout deux. Cette innovation permet des possibilités multiples, autant via la modélisation des villes, qui rend possible un meilleur repérage pour l'utilisateur égaré, que via la "Street View", recréant à partir de panoramas réalisés à 380° les espaces parcourus par les fameuses "Google Cars". Tous ces éléments novateurs facilitent le tourisme, réel ou fictif : beaucoup se perdent et flânent sur Google Earth, afin d'e-explorer les magnifiques paysages péruviens, ou chinois, en passant par la Statue de la Liberté, un des monuments les plus recherchés sur le moteur de recherche. 
De fait, ce logiciel autorise les chercheurs eux-même à rêver, réfléchissant sur le potentiel de celui-ci dans le milieu scientifique. Certains botanistes avouent se servir de Google Earth pour accéder à des endroits peu accessibles, tout comme les géologues ou vulcanologues, pour estimer rapidement les effets d'une éruption sur un paysage ravagé par exemple.

Mais qu'en est-il des sciences sociales et humaines, comme l'histoire?

Les premiers à saisir l'importance de ce logiciel semblent être les archéologues, via l'héritage qu'ils possèdent par la photographie aérienne : les bâtiments antiques conservent un négatif dans le paysage rural ou urbain, et de nombreuses villae romaines ont pu être relevée grâce à Google Earth, tout comme des pyramides mayas entre autres. Pour les historiens, les facilités sont multiples : créations de cartes personnalisées, outils simples et efficaces, un choix multiple entre différents indicateurs - frontières, limites administratives, routes... - ainsi qu'une facilité de partages.
De fait, Google Earth peut devenir un outil significatif dans les sphères de recherches historiques,  même s'il possède des lacunes non négligeables. Tout d'abord, les historiens sont dépendants de Google pour les zones d'études. Comme mentionnés précédemment, les zones reproduites dépendent de sa localisation : les campagnes subissent dès lors un délaissement certain, comparées aux grands centres urbains mondiaux, tout comme de grands continents, pour lesquels la résolution d'image peut laisser à désirer, comme l'Afrique. Aucune donnée économique, politique, agronomique, voire humaine n'est donnée par ce logiciel.

Google Earth est donc un outil pertinent au cours d'une étude historique, mais ne se suffit pas à lui-même. Il propose des fonctionnalités de présentations que peu d'autres peuvent, mais n'est qu'un "fond de carte", et c'est bien le chercheur, qui, au final, ajoute de l'intérêt et des informations, via ses recherches, sur cette photographie en trois dimension terrestre.


Lien vers : Carte de la répartition du lieu d'habitation des volontaires du 1er arrondissement lyonnais en 1914



Rapport méthodologique : Google Earth

Rapport méthodologique : Google Earth


             Google Earth est un logiciel développé en 2004 qui permet de naviguer sur un globe virtuel.

             Les images satellites couvrant le monde entier donnent la possibilité d'observer avec une haute résolution de nombreuses grandes villes du monde. La « Street View » permet même, dans certaines villes comme Londres, de distinguer les personnes dans la rue. La qualité de l'image dépend cependant des lieux géographiques : les zones rurales et beaucoup de grandes villes ne bénéficient pas de la même résolution que d'autres régions ou d'autres villes comme Las Vegas ou Paris. 
         En outre, ce logiciel peut afficher la surface de la Terre en 3D, ce qui est une de ses caractéristiques les plus importantes et le rend particulièrement intéressant comparé à d'autres logiciels de cartographie.
            Google Earth est utile pour l'historien car il permet de trier et de regrouper des informations grâce à la création de cartes personnalisées qui peuvent accompagner un document ou un texte et qui aident le lecteur à se représenter une situation donnée. Les outils pour élaborer de telles cartes sont simples d'utilisation (points-repères, légende, photographie,...) et le logiciel offre de nombreux choix dans les types d'information en surimpression (éléments géologiques, éléments administratifs, constructions humaines,...). 
                  La carte élaborée pour soutenir une partie du mémoire indique les principaux lieux de combats entre l'armée royaliste et l'armée ligueuse dans le gouvernement du Lyonnais pendant la Ligue catholique (1589-1594).                  





          

Suite du rapatriement vers la bonne destination à l'intérieur du blog

Google Earth
Le premier intérêt de Google Earth est sa couverture photographique aérienne mondiale. L’altitude d’observation est variable. On peut même, en mode Street View, avoir la vision au niveau d’un piéton. Cette possibilité n’est cependant disponible que pour certaines villes, en particulier occidentales (pas disponible pour Le Caire ou Niamey, par exemple). D’une manière générale, l’information est plus développée pour les concentrations urbaines que pour les régions inhabitées et le niveau de définition est bien supérieur.
Un second intérêt est de pouvoir sélectionner le type d’information que l’on veut faire apparaître en surimpression : administratives (frontières par exemple), physiques (météo par ex.), informations diverses attachées à un lieu (suivi des objectifs du millénaire par ex.) etc.
Troisième fonction : la création de cartes personnalisées grâce à des outils de dessin permettant de marquer un lieu, de tracer un linéaire ou un contour auquel sont adjointes des possibilités de mesure linéaire et surfaciques.
A signaler que, pour ce qui concerne le territoire français, le Géoportail de l’IGN est un outil alternatif intéressant : la définition est meilleure hors zone urbanisée et des couches inexistantes dans Google Earth ou Google Maps fournissent des informations supplémentaires : parcellaire, agriculture, aéronautique etc. 
Je remets ici ce qui c'était égaré dans le blog de 2014...

Géographie historique. Histoire d’une discipline controversée ou repères historiographiques.
Saudan M., Géographie historique. Histoire d’une discipline controversée ou repères historiographiques, Hypothèses, 2001/1, p. 13-25.


            Cet article d’une dizaine de pages est un texte introductif à une séance doctorale consacrée à des travaux relatifs à la géographie historique. Il retrace l’évolution de cette spécialité qui « se situe à la croisée des deux disciplines » (histoire et géographie). Si, pour un auteur contemporain tel que Paul Claval, la géographie historique étudie les différentes formes de peuplement et d’occupation de l’espace ainsi que leur évolution chronologique (Géographie humaine et économique contemporaine, 1984), il n’en a pas toujours été ainsi.

            La géographie historique dite traditionnelle s’est essentiellement intéressée, au moins en France, aux thèmes de la frontière et des circonscriptions civiles et ecclésiastiques à la suite des études régionales de l’historien Auguste Longnon (1844-1911). La question, encore en partie d’actualité aujourd’hui, est la suivante : existe-t-il une filiation entre les circonscriptions politiques, administratives ou ecclésiastiques ? Par exemple, quels rapports existe-t-il entre les limites et l’extension des territoires des tribus gauloises, des cités gallo-romaines et des diocèses ? Si la concordance grossière des espaces est en général admise, leurs limites sont plus discutées. Cette question des frontières est alors d’autant plus d’actualité que le désastre de 1871 alimente une réflexion à ce sujet jusqu’au conflit suivant de 1914.
            Pour les chercheurs en géographie historique, le concept et les frontières réelles ont varié dans le temps : dans la première moitié du XXe siècle, beaucoup pensent que les limites territoriales étaient précises et probablement linéaires à l’époque carolingienne (Jean-François Lemarignier, 1945) alors que la période suivante (Xe-XVe siècle) aurait connu des frontières floues, mouvantes, non linéaires, voire indéterminées (Gustave Dupont-Ferrier, 1902). Les travaux suivants remettent en cause cet avis à partir des années 1950 (Lemarignier, Duby) et tendent à montrer la précision des limites territoriales, y compris à la fin de Moyen-Age.

            Ces débats conduisent à faire évoluer la géographie historique. La notion de frontière s’élargit et se diversifie : Xavier de Planhol introduit l’idée de frontières culturelles, linguistiques, agricoles (Géographie historique de la France, 1988), lesquelles renvoient à de nouveaux ensembles territoriaux ; de la limite, l’intérêt se déplace vers l’espace qu’elle définit et les différences qu’elle met en évidence. La frontière est à la fois une conséquence de données naturelles et humaines différentes entre territoires (Michel Aubrun) et un initiateur de phénomènes politiques, économiques et sociaux (Pierre Guichonnet, Claude Raffestin).
Lucien Febvre a reproché à la géographie historique traditionnelle son manque d’attention à la réalité géographique, en particulier à l’espace et au paysage. Les relations de l’homme au milieu dans lequel il s’insère, et pas seulement ses limites, doivent y être étudiées. Un exemple éclatant de cette nouvelle approche est l’œuvre de Fernand Braudel, La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II (1949). Le « personnage » central est en effet un espace géographique et les liens avec l’histoire et ses différents temps sont omniprésents. Pour lui, la géographie historique traditionnelle doit évoluer vers une « véritable géographie humaine rétrospective » qui s’intéresse au moins autant au climat, au sol, aux plantes et aux bêtes, aux genres de vie et aux activités ouvrières qu’aux frontières d’Etats et autres circonscriptions.
Les études rurales, du paysage et des structures agraires, en particulier au travers des travaux de Marc Bloch et Roger Dion, ont aussi contribué à la géographie historique. Dans son Histoire de la vigne et du vin en France des origines au XIXe siècle (1959), ce dernier a bien montré qu’il ne s’agit pas là seulement d’une culture agricole qui modèle le paysage, mais aussi d’un fait de société avec lequel les connections sont multiples. Jean-Robert Pitte a aussi travaillé sur les évolutions de paysage mais, dans son Histoire du paysage français (1983), il se démarque de Febvre et Braudel à propos de la question des frontières ; pour lui, elles survivent aux évolutions des territoires qu’elles délimitent et font donc preuve d’une grande stabilité. D’autres études de géographie historique s’intéressent à des faits qui structurent l’espace en aires à caractère plus culturel : ainsi en est-il des travaux sur les zones de distribution du saucisson sec (Pitte, 1995).
En Grande-Bretagne, Robert Butlin définit la géographie historique classique comme la « reconstruction des géographies passées » ; elle rejoint alors l’histoire et la géographie rurale. Son approche est similaire à celle du théoricien Alan Baker qui s’intéresse plus à l’exploitation d’un fait qu’à la comparaison entre différents thèmes ou à l’organisation de l’espace dans son ensemble. Le plus connu des spécialistes anglais de géographe historique, Harry Clifford Darby, s’est attaché à étudier « la succession des formes d’organisation et de mise en valeur de l’espace » (Claval, 1984). Il en ressort des tableaux fournissant en particulier une description des paysages et structures agraires du passé, là encore, sans souci comparatif entre faits différents. Aux Etats-Unis, la géographie historique ne constitue qu’une sous-discipline de la géographie. Elle s’intéresse à l’histoire de l’environnement plus qu’à l’organisation de l’espace.

Ce rapide panorama illustre donc la diversité actuelle de la géographie historique. Si la question des frontières entre territoires a d’abord été son principal sujet de préoccupation, les espaces qu’elles délimitent et leur organisation focalisent aujourd’hui l’intérêt des chercheurs, qu’il s’agisse de l’étude des paysages, des réseaux ou des aspects plus institutionnels. Par ailleurs, à la différence de la géographie classique, elle s’intéresse d’abord au passé.

GEOGRAPHY AND HISTORY
Bridging the Divide
Baker, A.R.H. (2003) Geography and History: Bridging the Divide. Cambridge: Cambridge University Press.

Cet universitaire britannique se définit lui-même comme géographe historien et se fixe comme objectif la promotion d’un langage commun aux géographes et aux historiens afin de faciliter leur dialogue parfois difficile. En effet, pour certains géographes, les historiens de l’école des Annales auraient « annexé » la géographie depuis la Seconde Guerre mondiale.
Pour ce faire, il s’intéresse à une discipline qui emprunte aux deux autres : la géographie historique et, dans une moindre mesure, à l’histoire géographique. La première s’intéresse à la dimension historique de la géographie, la seconde à la dimension spatiale de l’histoire.
Selon Baker, au-delà des sujets d’étude différents, les questions, les sources et les méthodes de recherche de la géographie et de l’histoire sont similaires. Par contre, elles abordent le passé avec des perspectives différentes. Mais il serait excessif de dire que la géographie ne s’intéresse qu’aux lieux et l’histoire seulement aux populations. Il s’agit plutôt d’une attention particulière à ces thèmes respectifs.
La géographie historique a beaucoup diversifié ses sujets mais, au-delà des passions individuelles et des courants conjoncturels, Baker s’intéresse à ses aspects plus structurels.
De l’examen des principaux travaux qui traitent de la géographie historique en tant que champ d’étude, il retient d’abord celui de Jean Mitchell : Historical Geography, publié en 1954. Pour elle, l’objet d’étude de la géographie, ce sont les lieux comme produits des interactions entre les populations et leur environnement physique. Logiquement, elle définit la géographie historique comme l’étude géographique de périodes du passé pour lesquelles on a pu ordonner et dater des séquences temporelles relatives aux occupations humaines. Cependant, aux yeux de Mitchell, il existe une différence fondamentale entre le point de vue des historiens, pour qui le « monde » signifie la civilisation et celui des géographes pour lesquels le même terme désigne la surface du globe. Bien qu’ils partagent beaucoup en commun, leurs territoires intellectuels sont distincts et leurs objectifs différents. Elle n’en appelle pas moins chacun de ses collègues géographes à un travail de géographe historien.
Trente ans plus tard, William Norton publie en 1984 Historical Analysis in Geography. Il identifie plusieurs thèmes redevables de la géographie historique : études régionales ; études des frontières ; analyses de l’évolution des colonies et des paysages agricoles, industriels, urbains et des moyens de transport ; études de population. Mais lui-même se concentre sur l’analyse de l’évolution des formes spatiales. Dans son ouvrage paru en 1993, Historical Geography : Through the Gates of Space and Time, Robin Butlin propose une perspective plus historique dans laquelle la géographie historique est définie comme l’étude des géographies du passé.
Bien que les trois auteurs précédents, parmi d’autres, se soient intéressés à la géographie historique, Baker estime qu’aucun n’a vraiment examiné de manière approfondie la nature de la relation existant entre l’histoire et la géographie. Le statut de la géographie historique est lui-même sujet à débat : doit-elle constituer une sous-discipline de la géographie, distincte de la géographie humaine et des autres spécialités de l’histoire, ainsi que le promeut Darby, fondateur de la géographie historique moderne en Grande-Bretagne ? Ou n’est-ce qu’un ensemble d’approches particulières ainsi que le pense Norton ?
Baker estime, lui, que la géographie historique est une entreprise interdisciplinaire offrant des points de vue distincts de l’histoire et de la géographie sur les populations, les lieux et le passé. Afin de conforter cet avis, il examine ensuite les opinions exprimées par les historiens et les géographes sur les relations entre leurs propres sujets.
Ainsi, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, les historiens estiment que la géographie, comprise alors comme géographie physique, est au service de l’histoire dans la mesure où elle en fournit le contexte et un support de preuves tangibles (J. R. Green The Making of England (1881) par exemple). Elle est si importante que l’environnement détermine largement le cours de l’histoire des nations au travers du climat, de la terre et des produits exploités (George, 1901 ; James Bryce, 1902). En France, Jules Michelet pense aussi, en 1883, que « l’histoire est entièrement dans la géographie ». Victor Cousin va même plus loin en affirmant : « Donnez-moi la géographie d’un pays et je vous donnerai son histoire. »
Mais, sous l’influence de Paul Vidal de la Blache, notamment, les relations entre la culture et la nature apparaissent plus complexes, ce qui conduit les historiens français à s’éloigner du déterminisme géographique et à élaborer les notions de « possibilisme » et de « probabilisme ». Lucien Febvre en est l’un des principaux artisans ; dans La terre et l’évolution humaine : introduction géographique à l’histoire (1922), il conclut qu’il n’y a pas de nécessité mais seulement des possibilités que l’homme est libre d’utiliser ou non. La perspective est alors inversée : c’est l’homme qui est premier, non plus les conditions locales de son environnement. Celles-ci exercent leurs influences mais l’homme agit également sur ce qui l’entoure. Et peu importe pour Febvre que celui qui s’intéresse à ces interactions soit étiqueté géographe, historien ou sociologue.
Fernand Braudel illustre également dans La Méditerranée et le monde méditerranéen au temps de Philippe II (1949) l’importance de la géographie dans l’histoire ; le troisième rythme d’évolution qu’il identifie est celui du temps géographique et de l’histoire structurelle, lent mais fondamental, après ceux du temps court des individus (histoire événementielle) et du temps intermédiaire des économies et des sociétés (histoire conjoncturelle). Il emploie également le terme de géohistoire qui englobe les contextes spatiaux et environnementaux des activités humaines. Mais Baker pense que l’ « histoire globale » de Braudel et des historiens de l’école des Annales, en convoquant les autres sciences sociales, a amoindri de manière indue le rôle assigné à la géographie en la réduisant à un constituant de l’histoire et à des études de relations dans l’espace.
Comment les géographes voient-ils à leur tour l’histoire ? En Europe, fin XIXe et début XXe, le terme d’« histoire géographique » a été principalement utilisé par les géographes pour désigner les études relatives aux évolutions des frontières et entités politiques. Puis sa signification évolue et s’identifie, pour Pergamini en 1942, à la géographie humaine du passé. Dion accentue ce point de vue : pour lui, on ne peut pleinement comprendre les géographies humaines d’aujourd’hui qu’en examinant leurs histoires.
En Amérique du Nord, pour la plupart des géographes tel que Semple (1903), la géographie représente essentiellement la scène sur laquelle se déploie le théâtre de l’histoire, en l’influençant de manière forte. Un tournant intervient avec Richard Hartborne qui, dans The Nature of Geography (1939), affirme que la géographie et l’histoire sont des disciplines différentes et donc distinctes. Cette opinion influence les géographes anglo-américains pendant des dizaines d’années, même lorsque son auteur nuance son propos vingt ans plus tard dans Perspective on the Nature of Geography (1959). Elle éclipse en particulier The Geography behind History (1938) dans laquelle W. Gordon East exprime une appréhension plus ample de la géographie en y intégrant l’étude des interactions entre les peuples et leur environnement physique, les paysages et territoires qui en résultent ainsi qu’une évaluation de la localisation géographique sur le déroulement de l’histoire.
Mais la plus forte influence dans ce domaine parmi les géographes a été celle de Darby (1953) qui a identifié quatre thèmes à la frontière intellectuelle de la géographie et de l’histoire : les influences géographiques sur l’histoire, les géographies du passé, la représentation des paysages évolutifs et l’approche historique dans la description géographique. Les relations entre l’histoire sociale et la géographie humaine étudiées par André Blanc (1967) ont aussi contribué au rapprochement entre géographie et histoire. Celui-ci est d’ailleurs constaté aussi bien par Marcel Roncayolo (1989) que par Jean Bastié (1997).
En ce qui concerne la géographie historique elle-même, E.W. Gilbert lui assigne en 1932 la fonction de « reconstruire la géographie régionale du passé ». Darby fait évoluer la discipline en l’identifiant à une approche dans laquelle les données sont historiques et les questions et méthodes géographiques. Pour lui, toute géographie est géographie historique.
En définitive, Baker estime qu’il n’est pas absolument nécessaire de définir un territoire propre à la géographie historique. La géographie et l’histoire constituent seulement deux manières complémentaires d’appréhender le monde, même si lui-même travaille surtout dans une approche géographique.
Dans son chapitre conclusif, il formule sept principes qui définissent selon lui la géographie historique :
-          comme l’histoire, elle pose des questions à propos du passé, mais elle traite essentiellement de questions géographiques ; c’est donc l’étude géographique du passé. Ses sujets concernent aussi bien la répartition et l’évolution spatiale des activités humaines que les relations des populations avec leur environnement physique dans le passé ou les paysages anciens ;
-          ses sources, comme celles de l’histoire, sont problématiques en ce sens qu’il existe toujours une tension entre «fait » et « interprétation ». La géographie du passé que nous reconstruisons est, strictement parlant, imaginée, non la géographie réelle. Il en résulte des travaux privilégiant, soit la théorie, soit les sources empiriques ;
-          ceci induit en pratique une place centrale au débat afin d’atteindre un consensus qui demeure provisoire et se renouvelle en permanence ;
-          elle s’intéresse essentiellement aux évolutions dans le temps qui mettent en jeu la géographie (étude de diffusion spatiale par exemple) ; elle est d’abord diachronique ;
-          elle est centrale à l’intérieur de la géographie considérée comme un tout, et non à sa périphérie. Même en géographie humaine contemporaine, la perspective historique est nécessaire ;
-          elle s’intéresse fondamentalement à la construction d’une perspective synthétique relative aux lieux, non à l’analyse spatiale. Il s’agit de reconstituer les différentes significations des événements accumulés en un lieu donné dont l’état présent ne constitue qu’un palimpseste.
Néanmoins, pour Baker, si ces principes sont utiles à la définition des « frontières » du territoire de la géographie historique, il est convaincu de leur perméabilité et appelle de ses vœux leur franchissement.


Au terme de cette lecture, je me permets de donner mon sentiment, ambivalent et (un peu volontairement) iconoclaste : fallait-il vraiment écrire plus de 220 pages pour expliquer et tenter de réduire les différences entre les points de vue des géographes et des historiens sur leurs disciplines, points de vue dont l’auteur constate en parallèle la convergence en cours ? Les différends paraissent parfois ténus, voire en partie artificiels. Quant à la géographie historique, la définition de son périmètre ne semble pas faire l’objet d’un consensus, au-delà d’une définition très générale. Et l’essentiel n’est-il pas d’apporter une meilleure compréhension de la manière dont les hommes ont interagi entre eux et avec leur environnement, quelle que soit la bannière sous laquelle se range celui qui en est l’auteur ? Mais c’est sans doute faire bon marché de l’organisation nécessaire de la recherche par spécialités et des prérogatives de chacune. De plus, cette opinion de néophyte doit être amendée car le discours de Baker permet également de saisir des nuances dans les différents volets de chacune des disciplines et, singulièrement, de la géographie.