Ce projet, lancé en 2009 par Anne Knowles, professeur de géographie est de réunir historiens et géographes autour de l'exploration des méthodes géographiques et de l'étude de l'holocauste à travers des questions géographiques. Ce groupe se présente comme le premier ensemble de chercheurs qui décide de combiner histoire et géographie dans l'étude du génocide juif.
Dans
un premier temps, les systèmes d'informations géographiques
deviennent un outil novateur pour l'historien. Son utilité semble
être reconnue dans les domaines de l'histoire urbaine, notamment
mais plus négligée en ce qui concerne d'autres pans de l'histoire.
Ainsi, ce projet montre-t-il l'exploration que permettent ces outils
lorsqu'on s'intéresse à des faits plus politiques tels que
l'holocauste perpétré par l'Allemagne nazie. L'objectif principal
d'une utilisation de ces outils, est de saisir les dimensions
géographiques et géopolitiques du génocide en utilisant
les systèmes d'informations géographiques pour
cartographier
l'holocauste à plusieurs échelles – étudier
le processus génocidaire à l'échelle du continent européen,
exprimer les différence régionales, mais aussi s'intéresser à
l'expérience individuelle, notamment en retraçant les trajets des
déportés depuis le lieu de leur arrestation jusqu'aux camps de
concentration – . D'autres
travaux se sont intéresser à ces perspectives:
on peut notamment évoquer l'Atlas
de la Shoah. La mise à mort des Juifs d'Europe, 1939-1945,
qui
s'intéresse à la sophistication de l'organisation du génocide à
toutes les échelles spatiales, et offre donc aussi, à travers des
cartes notamment, les dimensions géographiques d'un tel
« événement ».
D'autre
part, l'utilisation de la cartographie, telle qu'elle est faite ici,
est un outil pédagogique non négligeable : en effet, traduire
visuellement des événements est un bon moyen de les communiquer,
d'autant plus lorsqu'on met ces ressources à disposition sur l'outil
internet. Il permet, en outre, la valorisation de certaines sources
historiques : principalement des photographies. Ce projet a donc
déjà pour ambition et résultat le partage des savoirs à une
potentielle large communauté de chercheurs ou d'amateurs.
En
effet, les cartes animées, consultables sur le site du « United
States Holocaust Memorial Museum », se présentent sous forme
de petites vidéos, accompagnées de commentaires vocaux explicatifs,
ce qui rend le potentiel pédagogique de ces vidéos très important.
Pour donner un exemple, la carte animée consacrée au camp de Dachau
combine documents d'archives (des photographies notamment), cartes et
commentaires (vocaux et écrits, ce qui permet de plus, au propos
d'être accessible aux sourds et malentendants, ce qui n'est pas
toujours le cas des communications universitaires) : lorsque le
commentateur explique que le camp fut construit sur le terrain d'une
usine abandonnée, la carte animée permet à une personne
« ignorante » de localiser la ville de Dachau en
Allemagne. Ainsi, pouvoir percevoir la localisation d'un lieu ou
encore la distance entre cette localisation et d'autres lieux
emblématiques d'une période permet une nouvelle compréhension du
sujet étudié. D'autre part, la reconstruction virtuelle des camps,
que ce soit par plans, ou même en 3 dimensions, permet de comprendre
l'organisation concentrationnaire, et de croiser cet outil avec les
sources : par exemple les films réalisés par les SS eux-mêmes
au sein des camps, ou encore aux films et photographies pris par les
alliés au moment de la libération des camps. Chester Harvey,
chercheur responsable de la reconstruction en 3D des camps, affirme
l'intérêt pour l'historien de comprendre ce qu'a pu voir celui qui
a filmé de là où il était positionné, grâce à la
reconstruction virtuelle des camps par ordinateur, et l'opportunité
de comprendre pourquoi ils auraient choisi de se focaliser sur un
angle particulier, par exemple.
Des
limites à ce projet sont cependant notables. En effet, si on regarde
de très près, les cartes animées peuvent sembler parfois très
simplifiées. Si l'on regarde la carte animée intitulée « The
Holocaust », on note par exemple un manque de précision sur
les cartes, notamment lorsque sont retracées les conquêtes
territoriales de l'Allemagne nazie, la France étant entièrement
colorée comme conquête territoriale allemande au même titre que la
Pologne. Ainsi, nous pourrions dire que ces cartes ont une visée
pédagogique certaine, mais qu'elles restent un outil très peu
intéressant pour l'historien. Le projet rayonne de ses promesses,
mais les cartes qui sont pour le moment mises à disposition sur le
site du musée de l'Holocauste, sont très limitées en termes
d'apports scientifiques. Elles permettent une vulgarisation des
savoirs universitaires et une traduction visuelle des événements
historiques de la période, mais ne peuvent constituer réellement un
outil d'envergure pour l'historien en tant que chercheur.
No comments:
Post a Comment