Les cinq sites utilisent les SIG au
service de l’histoire mais se distinguent par le public auquel ils s’adressent,
le niveau requis pour les exploiter, le domaine exploré, le volume des
ressources, l’aspect collaboratif et/ou interdisciplinaire plus ou moins marqué,
le caractère évolutif ou figé, la possibilité de se construire un itinéraire de
visite, de télécharger des données, leur financement, entre autres.
Les SIG peuvent être conçus comme des
outils de travail collaboratifs pour chercheurs à l’image du site ALPAGE
relatif à l’information géohistorique sur Paris. Il s’agit d’une réalisation
interdisciplinaire associant historiens, géographes, archéologues et
informaticiens. Initié sous l’égide de l’ANR, du CNRS et de la ville de Paris,
il a ensuite poursuivi son enrichissement grâce à des collaborations moins
encadrées entre chercheurs et étudiants, ce qui permet une mise jour annuelle
ou bisannuelle. Néanmoins, la récupération de données cartographiques par le
visiteur est possible. Plusieurs niveaux d’utilisation sont donc accessibles de
la simple restitution à la création de cartes originales à partir des données
stockées et personnalisables graphiquement. L’apport original des GIS et ici
évident par rapport à un simple support écrit classique.
Dans le domaine de la recherche, le
site Mapping the Lakes présente la particularité d’annoncer d’emblée son caractère
expérimental : c’est le domaine auquel il s’applique qui est nouveau, à
savoir la littérature. Au travers de deux récits de voyage dans la même région
écossaise, il s’agit de voir en quoi l’utilisation d’un GIS peut enrichir la
compréhension d’un texte littéraire mettant en jeu des lieux et un espace donnés.
L’aspect historique est assez peu marqué, mis à part le fait que les deux voyages
datent de 1769 et 1802. Les informations cartographiques sont limitées mais l’important
n’est pas là pour les chercheurs. Ils s’attachent par contre à développer les
problèmes rencontrés, les questions posées par l’utilisation des SIG dans un
domaine tel que la littérature, les apports possibles. Il s’agit d’un projet qui
permet aussi de tester la possibilité d’interdisciplinarité. Il est par
ailleurs conduit avec des moyens très limités (de l’ordre de cinq personnes) et
financé par une institution, la British Academy.
A l’autre extrémité du spectre en ce
qui concerne les moyens, The Valley Project met en œuvre des ressources humaines
considérables (plusieurs dizaines de personnes, universitaires et étudiants, mais
aussi techniciens). Le financement est assuré par plusieurs institutions et fondations,
notamment universitaires. La richesse du site est impressionnante et s’apparente
plus à une bibliothèque qu’à une seule ressource. Bâti autour d’archives sur la
période de la guerre de Sécession (1850-1870), il autorise et impose même un
parcours personnalisé dans la mesure où la visite ne peut être exhaustive. L’interactivité
est limitée, même si des recherches à partir de paramètres choisis sont
possibles. Les ressources sont construites à partir des archives et utilisent
en partie seulement les moyens des SIG. Au travers de données relatives à deux
comtés de Virginie et de Pennsylvanie, elles servent de support à une
reconstitution de l’environnement et de la vie quotidienne des acteurs de l’époque.
Le site s’adresse en premier lieu à un public large intéressé par l’histoire américaine.
Tourné lui aussi vers un vaste public,
A Vision of Britain, sollicite très directement le visiteur en faisant appel à
un moteur de recherche à partir d’un nom de lieu. Il s’agit d’un site
collaboratif libre dont les sources historiques portent sur des cartes anciennes,
des recensements, des résultats d’élections et des récits de voyages. L’aspect
pédagogique est nettement marqué via la présence de guides et de tutoriels. Deux
particularités méritent d’être signalées : la base de données est mise à profit
pour répondre à des besoins personnalisées en matière de généalogie, activité
populaire susceptible d’amener un public a priori peu intéressé par les autres ressources
historiques du site. Autre signe distinctif : une partie des données
téléchargeables sont payantes, ce qui permet de financer, au moins
partiellement, le fonctionnement.
S’il
présente un caractère pédagogique encore plus marqué, GIS for History s’adresse
à deux catégories de public bien ciblées : les lycéens et étudiants, d’une
part, les professeurs d’autre part. Aux premiers, il propose l’exploration d’une
série de thèmes historiques relatifs au peuplement des Etats-Unis depuis 1790. L’étudiant
est guidé dans sa démarche par une série de questions auxquelles il peut
ensuite tenter de répondre en s’appuyant sur les ressources cartographiques et
statistiques concernant l’histoire proprement dite, la démographie, l’économie,
le volet social. Les données historiques du peuplement (recensements) se prêtent
particulièrement bien à l’utilisation de l’outil GIS qui en procure une
visualisation spatiale frappante. Du côté des enseignants, le site fournit des
plans de cours directement utilisables. L’aspect pratique a été particulièrement
soigné, y compris à un niveau de détail avancé (feuille d’évaluation des
étudiants, par exemple). Par contre, il s’agit d’une ressource très dirigée, offrant
une souplesse d’utilisation limitée. Un site construit en grande partie par des
enseignants pour des enseignants, mais qui vise aussi à élargir et faciliter l’accès
aux données historiques chiffrées.
Les sites explorés présentent des
caractéristiques bien différentes en termes de promoteurs, de publics visés, de
mises en œuvre spatiales des données historiques, de financement, de domaines
explorés ; cette variété constitue en soi une bonne illustration d’une
certaine entrée dans la maturité de l’utilisation des GIS en histoire. Une
diversification qui est appelée à s’enrichir et montre que, utilisée de manière
pertinente, l’approche spatiale de l’histoire rend des services originaux.
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